Mme Nina Bley / DG  de Mines Import-Export : `` les hommes font de ce système leur chasse gardée au point de nous rendre la tâche difficile``

Après avoir travaillé pour plusieurs entreprises de la place, Mme Nina Bley décide de se lancer dans la vente de véhicules en créant sa propre structure. Tenace et déterminée, elle nous parle de son parcours.

Que retenir alors de votre parcours professionnel?

Cet itinéraire, aussi modeste soit-il, j'espère vous instruira comme il se doit. Pour gravir les échelons, la PETROCI a tracé les sillons de mon parcours en m’ouvrant ses portes pour un stage dans le service DRH. Ce fut, là, le début d’une aventure palpitante et plaisante. Plus tard, avec ce bagage en ressource humaine, j’ai servi à la BFA, en tant qu'assistante marketing jusqu'à la fermeture de la banque. Après cela, pour faire contre mauvaise fortune bon coeur, j'ai saisi la main tendue de ma directrice marketing d’alors qui avait ouvert une agence communication, sa propre structure. j’y étais en qualité de chef publicité. Les choses allant decrescendo, Je suis restée un bon moment oisive avant de m’intéresser véritablement dans l'importation et l'exportation de véhicules. J'ai inséré le domaine de l'exportation des matières gastronomiques. Ce fut de la marchandise diversifiée, notamment l'attiéké, les escargots, le gnangnan...exportée vers les Etats-Unis. Cette idée de génie, je la doit à mon entourage qui m'a inspiré en ces termes: ‘’Au lieu de le faire de manière officieuse, pourquoi ne pas ouvrir une structure afin de le faire de manière professionnelle.’’ Et, après moult réflexion, Je n’ai pas attendu midi à quatorze heure pour me lancer. J’avoue que je suis sidérée par le résultat bien probant car Il m’a fallu seulement un mois pour réaliser tout ceci. Tel est le chemin sinueux qui a abouti à ce domaine. Il me plait, de ce fait, de mentionner que je suis tenace, déterminée et obnubilée. Quand quelque chose me passe par la tête, il faut impérativement que je passe à l’action au risque de baisser les bras, pour me poser des questions et au final ne rien donner.

Dites-nous, depuis quand exercez-vous dans la vente de véhicules?

Force est de reconnaître que nous exerçons dans le domaine depuis 4 ans déjà. Mais le début de la professionnalisation date du 5 Juin 2017. La remarque est pertinente de voir que les femmes ont davantage de côte dans l’univers de la vente de l’automobile. Qu’est ce qui explique cela? Les femmes sont de nature audacieuse et courageuse. Elle l’est plus lorsqu’elle décide de jouer le premier rôle et se prendre en charge. Rien, en pareille circonstance, ne peut lui obstruer la voie. C’est le cas justement ici vu qu’elles se sont dit : Pourquoi rester à la maison? Pourquoi ne pas faire montre de notre capacité à égaler les hommes dans le travail, que nous sommes aussi capable de faire ce qu’ils peuvent faire? La volonté précède toute action. Sans volonté manifeste, pas d’action concrète en restant à la maison, pas de réponse à la question : ‘’Est-ce que je pourrai?’’, jamais vous n’y arriver. Ce sont tous ces paramètres qui sont ma source de motivation et la raison de mon engagement. Toutefois, il faut une bonne dose de passion et la curiosité pour avoir du coeur à l’ouvrage. Me concernant, j’ai côtoyé plusieurs personnes dans le domaine. Avec elles et près d’elles j’ai accepté d’apprendre, d’aimer ce métier là.

N’est- ce pas parce que les femmes sont plus dignes de confiance?

Le proverbe ne dit-il pas que “la femme est la ceinture qui tient le pantalon de l’homme”. Ce proverbe répond à tous égards à la question. Elles sont non seulement protectrices, mais aussi et surtout les chevilles ouvrières de toute entreprise sérieuse. Et c’est bon alois que l’on dit : ‘’quand une femme est au devant des choses, ça avance rapidement.’’ On sait que les femmes sont plus sensibles. Cependant, pour qu’elle escroque une tierce personne, il faut vraiment qu’elle soit sans cœur. Parce qu’avant tout, les femmes sont des mères, elles sont sensibles, elles pensent et réfléchissent beaucoup mieux que les hommes. La femme est apte à faire plus que l’homme, et même mieux que l’homme ne peut le faire. Le constat est édifiant sur ma page Facebook par rapport aux hommes qui le font. Ils ajoutent une marge très considérable que moi je ne fais pas parce que j'éprouve de la pitié. Je tiens évidemment compte de la conjoncture actuelle pour que chacun, homme, femme et jeune puisse s’en sortir. Ce n’est pas pareil avec les hommes qui ne sont pas tous sensibles.

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans le milieu de la vente de véhicule?

Vous conviendrez avec moi que la phallocratie existe dans tous les domaines. Et notre domaine n’est pas en reste. Les hommes font de ce système leur chasse gardée au point de nous rendre la tâche difficile. Ils se sont même accoutumés des propos discourtois frisant très souvent l’humiliation. Bien couramment, Ce n’est pas forcément un client qui crée un compte Facebook pour te nuire à travers des mots qui fâchent, mais plutôt un conquérant. Ils vont jusqu’à demander si les prix plus bas affichés des véhicules existent ? C’est purement et simplement une intention manifeste pour eux de dénigrer et me mettre du plomb dans l’aile. Ils y en a d’autres qui ne m’adressent plus la parole. Et les ragots des détracteurs vont bon train et chacun use de machiavélisme juste pour te voir échouer. D’autres personnes, côtoyées bien avant, se demandent comment cette dame a fait ? Elles ont voulu faire la même chose. Et les superstitieux te reprochent de ne leur avoir pas demandé leur bénédiction et la permission d’entreprendre dans le domaine ? Voyez-vous ? Ai-je vraiment besoin d’eux pour le faire? Aujourd’hui, ces personnes ne me parlent plus. Je les appelle en vain. Je me dis que c’est ainsi la vie. Il faut juste faire attention.

Vos clients sont-ils satisfaits ?

Je suis très rigoureuse et alerte, surtout même avec mes correspondants en Europe. Je ne badine pas avec le travail et tape fort quand c’est nécessaire. Puisque la personne n’a de valeur que par le respect de son engagement, pour satisfaire mon client je veux être sure et certaine de respecter ma parole. Lorsque vous travaillez avec sérieux et que le retour avec les collaborateurs et partenaires est favorable, on ne peut qu'être heureux. Pour le moment, donc, je suis enthousiasmée vu que je n’ai pas de problème. Le temps nous situera sur la suite. Il y a eu des cas où le client commande un véhicule et il se trouve que c’est déjà pris. Moi, dans mon souci de satisfaire mon client, je demande à mes correspondants de trouver quelque chose de plus neuf, attrayant et plus intéressant que celui que ce dernier souhaitait. Et jusque là j’ai été à la hauteur de la tâche en réussissant à satisfaire tous nos clients.

Qui sont vos meilleurs clients? Les femmes ou les hommes ?

À ce propos, disons que ce sont les hommes qui achètent plus les pour le moment. Mais je pense qu’avec le temps, les choses changeront étant donné que les femmes sont de plus en plus bien vues. Par exemple, il y a quelque jour, qu’une dame, qui prend bientôt sa retraite et souhaiterait avoir quatre taxis, m’a appelée. Nous avons échangé et elle m’a demandé de l’aide dans ce sens. Je lui ai répondu que je m’engageais à l’aider cause du fait qu’elle est entreprenante. J’aime les femmes entreprenantes. J’aime celles qui se démarquent de leur entourage. Parce qu’on a l’impression que dans le domaine du transport il y a que les hommes. Si une femme décide de le faire aujourd’hui, je ne peux que l’encourager.

Comment fidélisez-vous vos clients? Quelle est l’astuce ?

Chez nous, le client est roi et le satisfaire est plus qu’un devoir. Et notre leitmotiv est la satisfaction du client. Toute la stratégie mise en place est avant tout fonction de la satisfaction et la qualité du produit que nous leur offrons. Les ivoiriens sont devenus très prudents et exigeants en terme de service. Ils ont, pour ce faire, tendance à visiter toutes les pages Facebook, ils se renseignent pour voir et comparer les prix avant d’acheter quelque chose. Aujourd’hui, nous faisons une étude du marché ivoirien, essayons de voir à combien les autres vendent un véhicule et en fonction de cela nous faisons un rabais du prix en ajoutant une faible marge. Quand le client sait qu’avec nous il aura un véhicule non seulement de qualité, à moindre coût et avec un bon moteur, parce que dans le domaine de véhicule c’est d’abord le moteur. Il ne se fait pas prier quand le véhicule acheté fait un an avec le client avant d’aller au garage, il ne se posera pas de question pour le prochain achat et sûrement il se tournera vers vous.

C’est ce qui fait le point fort de la société ?

Effectivement. C’est notre force, et nous y tenons vraiment. Nous faisons l’effort de mettre en place toutes les commodités d’entretien pour pallier les problèmes et les obstacles. Nous avons un mécanicien sur place dans tous les différents pays. Avant de prendre un véhicule, nous nous assurons que le mécanicien nous a dit que le moteur est un moteur A1. Dans notre jargon, un moteur est A1 est un moteur qui ne présente vraiment pas de problème et qui l a un très bon niveau. Alors, Il peut faire 5 ans, 6 ans voire 10 ans avant d’avoir un problème.

Quelle est votre priorité pour 2018?

Je l’ai dit tantôt, chez nous le client est roi et sa satisfaction est un souci permanent. Notre priorité aujourd’hui, c’est notre clientèle, faire l’effort de pouvoir les satisfaire, ne pas sombrer est avant tout primordial. Tout faire pour que nos clients, quelque soit leur origine, quelque soit leurs moyens, puissent avoir au moins un véhicule avec nous. Voir comment aider et faciliter la tâche à ces personnes qui n’ont pas les moyens en leur offrant des modalités de paiement très abordable. Aussi ne pas oublier notre slogan: ‘’la satisfaction du client, notre priorité.’’

Un mot à toutes les femmes d’Afriquefemme…

Je demande à toutes les femmes de se démarquer des hommes parce que c’est le moment. Il ne faut pas hésiter avant d’entreprendre quelque chose. Ne pas se dire que le transport, c’est pour les hommes. Avec cet esprit défaitiste, rien ne marche. Il faut essayer. Ne baissez pas les bras car tout début est difficile et Rome ne s’est pas construit en une seule journée. Ce n’est pas facile mais, chemin faisant vous allez y arriver. Je demande aux femmes, de ne pas se dire qu’il y a des boulots de femme et des boulots d’homme. Parce que les boulots d’homme, les femmes peuvent les faire et les boulots de femmes, les hommes aussi peuvent les faire, il ne faut pas particulariser les domaines d'activité. Les hommes ont des salons de coiffures. Autrefois, on se moquaient des femmes qui faisaient la série C, sous entendez la coiffure où la couture (Rire), mais aujourd’hui, les hommes aussi se mettent à la tâche. Alors pourquoi une femme ne peut pas être Directeur? Ministre? Pourquoi une femme ne peut pas être Présidente de la République? Pourquoi une femme ne peut pas se lancer dans l’automobile? Pourquoi une femme ne peut pas être docker au Port? Pourquoi une femme ne peut pas être apprenti? C’est une question de mentalité et de volonté, une question de force parce qu'il faut avoir du courage pour le faire, pour faire un boulot d'homme. Quand les hommes pensent qu'un boulot, est leur chasse gardée, c'est difficile pour la femme de s'en sortir parce qu’ils feront tout pour la déstabiliser. Mais si elle a le courage, la force, elle va y arriver. Il faut que les femmes arrêtent de se poser des questions, Il faut essayer, oser. On peut réussir avec 5 000 FCFA. On peut réussir avec 1000 FCFA même. Les vendeuses ambulantes de sachets d’eau dans les rues, elles achètent un paquet d’eau à 500 FCFA, les revendent à 1000 FCFA et au fur et à mesure elles font des bénéfices. C’est à force d’accumuler les bénéfices, d'accroître son activité qu’on forge son ambition. Tant que tu n’essayes pas et que tu attends des millions tu n’auras rien. Moi même aujourd’hui je suis directrice, j’ai commencé très bas, avec 5 000 FCFA. J’ai vendu des bracelets à Adjamé, des pacotilles, des chaînes. Quand on a des bénéfices on ne dépense pas, on essaye de renforcer son commerce. Plus il y a de la marchandise on a assez de bénéfices. C’est ainsi qu’on s’en sort. Ce n’est pas facile. J’étais en classe de 3ème quand je partais de chez mes parents. J’aurais pu m’adonner à la facilité, me jeter dans les bras d’un homme puisque je suis belle mais j’ai vendu ces pacotilles là pour payer mes cours. Ce n’est pas mon père qui a financé mes cours après la classe de 3ème, c’est moi jusqu’à aujourd’hui. On ne va pas demander aux femmes de rester les bras ballants, à attendre qu’un homme nous donne un fonds de commerce. Tout est une question de volonté. Si tu veux tu peux y arriver. Il faut se lever le matin pour se chercher, ne restez pas à dormir chez vos parents ou chez un homme à ne rien faire. Ce temps est révolu. Les hommes n’aiment plus les femmes oisives et flemmardes. quand ils s’imaginent que les charges sont unilatérales, qu’ils sont les seuls à tout faire (payer la maison et toutes les charges en plus de te nourrir). Ils peuvent te traiter de tout et tu ne peux que rester de marbre. En revanche, sachant que tu es solvable, ils mesurent leurs propos parce qu’ils sont conscients de ton indépendance. Ils savent bien qu’avant eux, tu existais et après eux tu continueras d’exister. Les hommes flagellent les femmes qui ne travaillent pas. Lorsqu’un homme bat une femme qui travaille c’est qu’elle a eu un comportement déplacé. J’exhorte les filles, les femmes à faire quelque chose, lorsque l’homme viendra et qu’il verra ce que vous faites même si cela ne lui convient pas il vous aidera pour ce qui lui convient. C’est l’appel que je lance aux femmes.

 

Florence Bayala