Sandrine, 36 ans, amputée après un choc toxique lié à une cup menstruelle

Amputée de ses deux pieds, Sandrine Graneau doit suivre des séances de rééducation pour apprendre à gérer ses prothèses. LP/Sébastien Salom-Gomis

La jeune femme a été amputée des pieds et d’une partie des doigts. L’Anses appelle à une meilleure information des femmes et des professionnels de santé sur ce syndrome rare mais qui peut s’avérer très grave.

Comme tous les mardis, et jeudis, Sandrine Graneau passera sa journée à faire de la rééducation. Garder une position statique, marcher dans le sable ou sur des graviers, il y a tant de choses à réapprendre depuis que des tubes en métal ont pris, dans ses baskets, la place de ses pieds. Les deux ont été amputés, le 11 juin, trois semaines avant l’ablation d’une partie des doigts de ses mains.

Si Sandrine la pimpante doit faire le deuil de ses membres et avec eux de sa vie d’avant, c’est que cette infirmière de 36 ans a été victime d’un choc toxique menstruel. Récemment, ce syndrome a fait couler beaucoup d’encre avec le décès en Belgique de Maëlle, 17 ans, dont l’infection a été causée par un tampon. Mais elle peut aussi être liée à l’utilisation d’une cup menstruelle - une coupe en silicone, avec une forme d’entonnoir pour recueillir le sang. Sandrine ne le sait que trop bien, elle qui prend la parole, ni pour faire peur, ni pour dire d’y renoncer, mais pour que chacune d’entre nous soit mieux protégée. De son côté, l’agence de sécurité sanitaire Anses, appelle à ce qu’une « information plus claire » soit délivrée aux femmes.

« Quand j’entends que l’infection est liée à un mésusage des cups et tampons par les femmes, cela me met hors de moi, tant les informations que l’on nous donne varient. Prenez les cups, selon le fabriquant, il est écrit sur les notices que l’on peut les garder 4, 6, 8 ou 12 heures ! Comment on s’y retrouve là-dedans ? s’exclame-t-elle. Pourquoi un temps d’utilisation clair et net n’est-il pas indiqué en gros ? Après tout, on le fait bien sur les paquets de pâtes. »

Elle ne sait pas combien de temps, en ce jour d’avril, elle a gardé la sienne. Plusieurs heures, assurément. L’habitante de Loire-Atlantique était en fin de règles, il fallait faire dîner les enfants… Et puis, dans la soirée, des douleurs d’abord légères puis intenses se sont installées dans son ventre. Le médecin de SOS a cru à des calculs rénaux.

Mais quand il est revenu le matin, la tension de Sandrine était si faible qu’elle n’était plus prenable. Un brancard a dû la sortir par la fenêtre. À l’hôpital, quand son teint a viré rouge vermillon, l’urgentiste a compris : choc toxique. « Ce n’est pas tant la bactérie qui est dangereuse que les ravages qu’elle cause sur les organes. La toxine se diffusait dans mes reins, mes poumons, mon foie », explique celle qui a passé trois semaines en réanimation.

Une association pour faire connaître le choc toxique

À son réveil, sa vie est sauvée mais les rêves qu’elle faisait de prothèses vont devenir réalité : il y a trop de plaies sur ses pieds, ses doigts sont nécrosés. « Il a fallu couper dix-huit phalanges mais on a pu en sauver une sur chaque doigt. C’est ce qui me permet de tenir le téléphone pour vous parler », lance-t-elle. Ou de faire, seule, le shampoing d’Augustine, 5 ans, la dernière de ses trois enfants, nous confie, voix pleine enthousiasme, cette bricolo dans l’âme, fan de couture et de cuisine. « Si moralement je suis foutue, tout est foutu ; alors, je m’accroche, même s’il y a des jours moins faciles. »

En septembre, des jeunes de Montoir-de-Bretagne, sa petite commune, ont organisé une soirée en son honneur. Elle aimerait faire de la prévention dans des établissements et a créé son association, « Dans mes baskets ». « Ça me remet le pied à l’étrier », dit-elle, rigolant de son jeu de mots mais bien décidée à faire connaître le choc toxique et à parler du monde du handicap qu’elle découvre peu à peu. Car chaque victoire est bonne à prendre. Pour la première fois dimanche, elle a pu enfin remettre son alliance.