Concours de Miss : pourquoi les victoires de femmes noires sont une (petite) révolution

Miss Univers, Miss USA, Miss America, Miss France : toutes ont en commun le fait d'être des femmes noires. Une première qui challenge les représentations traditionnelles de la beauté.

"J'ai grandi dans un monde où les femmes qui me ressemblent, avec mon type de peau et mon type de cheveux, n'étaient jamais considérées comme belles." Sur le plateau de Miss Univers dimanche 8 décembre, la Sud-africaine Zozibini Tunzi a souligné combien sa présence parmi les 80 candidates du concours était importante. "Je veux que les enfants me regardent et voient mon visage, je veux qu'ils voient leur visage reflété dans le mien", a insisté la lauréate 2020 du concours de beauté mondial.

Régulièrement pointés du doigt pour leur sexisme, les concours de Miss ont permis cette année de mettre en valeur des femmes noires, loin des standards de beauté occidentaux des femmes blanches à la chevelure claire. Dernières victoires en date : celle de Clémence Botino, désignée Miss France 2020 et de celle de la Jamaïcaine Toni-Ann Singh, élue Miss Monde le même week-end.
Au-delà de Clémence Botino, Toni-Ann Singh et Zozibini Tunzi, trois autres Miss noires ont été élues cette année : Nia Franklin (Miss America), Cheslie Kryst (Miss USA) et Kaliegh Garris (Miss Teen USA). Une première dans l'histoire des concours de Miss, saluée par Michelle Obama elle-même, qui montre l'évolution de la représentation des femmes noires dans les médias.

À cette petite fille de St Thomas, en Jamaïque, et à toutes les filles de par le monde : croyez en vous-mêmes
Toni-Ann Singh, Miss Monde 

"À cette petite fille de St Thomas, en Jamaïque, et à toutes les filles de par le monde : croyez en vous-mêmes. Sachez que vous méritez et que vous êtes capables de réaliser vos rêves. Cette couronne n'est pas la mienne, mais la vôtre. Vous avez un BUT", a ainsi tweeté Miss Monde Toni-Ann Singh après sa victoire.

Miss France 2020 : concours sexiste ou promotion de la liberté des femmes ?

Inspirer les petites filles noires à croire en elles et à se sentir belles telles qu'elles sont, c'est le message qu'envoient ces Miss au monde entier. C'est pour cette raison que Zozibini Tunzi a insisté pour défiler au concours de Miss Univers sans perruque. "Je me suis dit 'tu sais quoi, je vais y aller telle que je suis, parce que je garde mes cheveux naturels depuis trois ans", raconte-t-elle selon le magazine Allure. "Je ne vois pas pourquoi je changerais juste parce que j'entre dans un nouveau milieu".

Une (petite) révolution

Pendant longtemps aux États-Unis, le concours de Miss America était interdit aux femmes non-blanches, jusqu'à ce que des manifestations soient organisées pour changer les règles. Les femmes noires, n'hésitent d'ailleurs pas à organiser leur propre concours de beauté en 1968 : Miss Black America qui se déroule encore aujourd'hui chaque année. Il a fallu attendre 1984 pour que Vanessa Williams soit la première femme noire élue première Miss America.

"L'idée de ce que l'on trouve beau s'est étendue. Couleur de peau. Morphologie. Cheveux bouclés. Si vous regardez les gagnantes de cette année, elles ressemblent à elles-mêmes", explique Hilary Levey Friedman, qui écrit un livre sur les concours de beauté, au New York Times. "Désormais, vous n'avez plus à ressembler à une Barbie. Il y a différentes versions de la beauté, et elles sont toutes acceptées".
Il y a bien quelque chose qui a changé et il faut que tout le monde l’accepte de manière positive

En France, la première Miss noire, Véronique de La Cruz, fut élue en 1993. Vingt-sept ans plus tard, lui succède Clémence Botino, Miss Guadeloupe 2019. Aussitôt élue, celle-ci a fait l'objet d'attaques racistes comme les Miss France Sonia Rolland, Alicia Aylies ou Flora Coquerel avant elle.

Invitée d'un live Facebook de TV Magazine, Clémence Botino a répondu avec hauteur. "On sait que tout le monde ne va pas être d’accord. Justement, il faut que je justifie mon élection, que je montre aux Français que j’ai ma place ici. Mais je n’ai pas peur", a-t-elle confié. "Vai (Vaimalama Chaves, ndlr) et moi sommes les deux premières filles d’outre-mer à se succéder. (...) Il y a bien quelque chose qui a changé et il faut que tout le monde l’accepte de manière positive."

Dans un entretien au Parisien, elle insiste également sur son choix d'avoir participé à Miss France et répond aux accusations de sexisme qui pèse sur le concours. "Si je dois défendre l'image des Miss, je le ferais. Être féministe c'est respecter le choix de chaque femme, et on a fait ce choix, c'est pour cela que l'on doit être respectées".