Starlyne Ada : « la femme africaine est dynamique, bouge, ose et exige le meilleur pour le continent »

Starlyne Ada, fondatrice de ’’La Palme production’’ et de la marque Fight Back Stories a séjourné aux Etats-Unis du 1er au 7 mai où le film Sceptre - dans lequel elle joue un rôle majeur - a été sacré à Los Angeles, prix du meilleur court métrage dramatique 2019. L’actrice gabonaise s’exprime sur cette consécration américaine, sa vision de la femme africaine leader engagée et sur le cinéma gabonais.

Vous êtes en voyage aux USA où le film SCEPTRE dans lequel vous tournez a été primé. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

En effet oui, notre film Sceptre de Rouben Manika a remporté le prix Platinum à Independent Shorts Awards à Los Angeles. Sceptre est un film choral retraçant le parcours de Stan, 24 ans, qui après avoir passé plusieurs années derrière les barreaux décide de retourner chez lui afin de renouer des liens avec ses proches, et ainsi retrouver un rythme de vie plus sain. À son retour au domicile familial, tout ne se passe pas comme prévu ; et ce, notamment lors des retrouvailles avec sa mère.
Cette femme de caractère, ayant élevé à elle seule ses deux enfants, paraît appréhender le retour de son fils aîné au sein du foyer. L’idée que Stan puisse influencer son petit frère, Carl, 10 ans, à suivre le même parcours que lui ne la rassure nullement. Malgré ce nouveau départ assez tumultueux, Stan n’en démord pas. Il n’a qu’un objectif : devenir un homme nouveau. Ses nouvelles résolutions sont contrariées le jour où un terrible drame, lié à son passé, vient le frapper de plein fouet ! Lui qui espérait tant démarrer une nouvelle vie entourée de ses proches se voit confronté à une terrible réalité : les démons de son passé semblent ne pas l’avoir oublié... Dès lors, la question qui se pose pour Stan : saura-t-il rester sur le chemin de la rédemption ou choisira-t-il la voie de la vengeance ?

 Dans ce film, j’incarne le rôle de la mère de Stan. C’est un court-métrage qui a été réalisé dans le but d’être présenté aux producteurs pour la réalisation de la version longue. Raison pour laquelle, il n’a pas été publié sur Internet ou dans les réseaux sociaux. Cependant, des projections à Noisy-Le-Grand et à Goussainville ont été organisées durant l’année 2018 et dans différents festivals nationaux et internationaux dans lesquels il a également fait parler de lui.
Il a notamment été Finaliste au Festival International de Calcutta (Inde), élu Meilleur court-métrage au African Diaspora Film Festival (Florence), sélection officielle au ShortFilm Festival à Goa (Inde) et au ShortFilm Festival de Pune (Inde), Shortfilm Corner 2018 (Cannes). Nous apprenons également qu’il vient d’être sélectionné dans deux autres festivals du film à New York et en Floride. Nous en sommes tous très fiers et espérons trouver une bonne production pour réaliser la version longue car c’est vraiment un film très prometteur avec une histoire très porteuse pour tout le monde.

Vous êtes une actrice franco-Gabonaise confirmée installée à Paris. Parlez-nous de votre parcours.

Alors, en ce qui concerne mon parcours, je dirais qu’il est très éclectique. En effet, étant une femme très passionnée et curieuse je m’intéresse à beaucoup de domaines. Pour ce qui est en lien avec le cinéma, j’ai débuté ma carrière artistique en 2012 au sein d’un groupe d’humoristes qui s’appelait AVSF (Art et Vie sans Frontière) au théâtre de Ménilmontant à Paris. Puis, j’ai poursuivi mon parcours en faisant les premières parties de concerts d’artistes africain en tant qu’humoriste.
Par la suite je me suis inscrite aux cours de théâtre du coach américain Charles Westein. J’ai suivi ses cours pendant 2 ans afin d’améliorer mon jeu d’acteur et d’apporter une dimension anglophone à mon cv artistique.

Après cela, je me suis faite repérée par des réalisateurs, des annonceurs publicitaires et des artistes musicaux pour des collaborations. J’ai collaboré avec des artistes africains tels que Fally Ipupa pour le clip Ndoki et pour des publicités avec la mutuelle MNH (Mutuelle National des hospitaliers et des professionnels de la santé), la mairie de Paris pour la lutte contre la prostitution et l’agence immobilière Richesse Immobilière et retraite.
J’ai aussi figuré dans le film « Le Crocodile du Botswanga » de Fabrice Eboué, « Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ? de Philipe de Chauveron et « Samba » de Eric Toledano et Olivier Nakach. Après ces quelques apparitions, j’ai obtenu mon premier rôle dans le long Métrage "Jeu de Dames " de Maxwell Cadevall.
Et depuis 2013 j’ai enchaîné les tournages, « Jour de Liesse » de Laurentine
Milebo, « Kidnapping » de Swingstyproduction, « La Source » de Dereck
Kassa Zapaligre, « L’envers du Bonheur » d’Eric Ntalie et récemment « Sceptre » de Rouben Manika.
Le métier d’acteur est un métier de longue haleine où la détermination et la persévérance sont les maîtres mots. Il faut cumuler beaucoup de petites choses pour avoir une vision plus large et concrète de son parcours.

Quelle analyse faites-vous du cinéma africain en général et gabonais en particulier ?

Je pense que le marché du cinéma africain est en plein essor. D’ailleurs, cela a pu se voir lors du dernier Fespaco 2019 (Le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou) ou plusieurs passionnés du cinéma africains (producteurs, réalisateurs, scénariste acteurs, et cinéphile) ont pris part à cette grande manifestation cinématographique.
Cette biennale du cinéma est l’une des occasions qui permet au cinéma africain de rayonner et de montrer ce dont il est capable notamment pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. D’autres festivals ont vu le jour (le Festival international de Durban ou le festival AFRIF à Calabar, le festival Vue d’Afrique et pleines d’autres). Les films africains entrent dorénavant sans complexe dans les sélections des festivals les plus respectés monde.

Nous remarquons qu’aujourd’hui la qualité, le genre, les thèmes des films prennent le pas sur des critères géographiques ou politiques. Ce qui nous amène à croire que de plus en plus de pays africains sont conscients des enjeux. Ils désirent proposer des produits de compétitifs susceptibles de concurrencer dans un futur proche des productions occidentales.
Et je loue ce changement, car s’il s’avère durable, cela profitera à tous les acteurs du marché du 7e art africain. Maintenant, en ce qui concerne le Gabon, je pense qu’il y’a également une très bonne évolution dans le domaine. De plus en plus de producteurs et de réalisateurs indépendants se lancent dans l’aventure afin de faire connaitre le cinéma gabonais au-delà des frontières.
De très bons films ont été sélectionnés dans des festivals. Pour n’en citer que quelques-uns, dernièrement j’ai apprécié le film de la jeune productrice et actrice Wilgrace Nguety « Le Destin de Gloire », mais aussi, « Si loin si Près » de Serge Abessolo avec à l’écriture l’excellent John Franck Ondo et l’une des actrices Rachel Ossima dont j’estime beaucoup le travail. Sans oublier le très talentueux Melchy Onbiang, le jeune réalisateur Derreck Kassa Zapamligre et la réalisatrice Samantha Biffot.
Tout ceci démontre que le cinéma Gabonais est en plein mouvement et que s’il continu ainsi, il pourra valablement concurrencer ses voisins du continent et se positionner comme acteur majeur dans sa catégorie. Malgré les efforts de certaines productions indépendantes, il demeure néanmoins très important de souligner que, si notre cinéma doit être pertinent et percutant, il doit être soutenu et accompagné par les pouvoirs publics.
Ce qui freine aujourd’hui certaines œuvres cinématographiques au Gabon, c’est le manque de financement ou le manque d’information dans le domaine. Les films doivent être réalisés dans de bonnes conditions avec des équipes talentueuses, formées et professionnelles. Par exemple ce n’est pas normal que nous manquions de salles de cinéma, que nous ne me mettions pas en place des programmes structurés qui permettent l’apprentissage de cet art ou bien que l’attribution des subventions soit aussi difficile d’accès.
Le domaine culturel et artistique ne doit pas être relayé au second plan dans le développement d’un pays. C’est un métier à part entière qui a besoin conditions idéales pour et être compétitif à l’échelle international. Je tiens aussi à rajouter qu’il est primordial de valoriser les acteurs du marché qui sont dans la diaspora. 
Pour vous parler très franchement, toutes les opportunités que j’ai eues m’ont été données par des collaborateurs venant d’autres pays d’Afrique, tels que le Sénégal, le Burkina Faso, le Congo, l’Algérie et j’en passe alors que je suis avant tout une gabonaise et qui souhaite promouvoir la culture et l’art Gabonais.
J’échange régulièrement avec certains réalisateurs et producteurs qui sont intéressés par mon profil et qui souhaitent collaborer avec moi. Mais, quasiment tous me disent que, bien qu’ils apprécient mon travail, le manque le financement ne leur permet pas de prendre en charge mon déplacement et mon cachet. Et cela me désole car si certaines aides étaient mis en place, beaucoup de chose seraient possibles. Et ensemble nous ferions efficacement et concrètement avancer le cinéma Gabonais dans nos pays d’accueils. C’est vers cette dynamique que nous devons tous travailler.

Vous êtes également connue pour votre projet Étape et Fight-Back sur le développement personnel et sur la création stylistique. Quel bilan faites-vous de ces projets et quelles sont vos perspectives ?

Au-delà de ma casquette de comédienne je suis également une entrepreneuse dans l’âme. J’ai créé la société La Palme Production qui englobe la marque de vêtement Fight Back Stories et le cabinet de conseil en développement personnel et gestion de stratégies Etape Conseil (dans lequel la méthode de croissance Fight Back est implémentée).


Je commencerai par le cabinet de Conseil, Etape Conseil, est un cabinet de conseil spécialisé dans le développement personnel et la gestion de stratégie des particuliers et professionnelles. Notre expertise repose sur la méthode FIGHT BACK, c’est-à-dire 9 leviers clés qui permettent un changement étape par étape. Au travers de ses 9 étapes de constructions, la méthode Fight Back vous aide à découvrir le potentiel insoupçonné qui est en vous et qui est susceptible de vous apporter un développement et une croissance matérielle, spirituelle et psychologique.
Après avoir compris les bienfaits du développement personnel dans la vie des gens, j’ai voulu associer ce terme à un élément physique qui aurait du sens. C’est donc là, le début de la genèse de la marque de vêtement Fight Back Stories. Bien plus qu’un vêtement, cette marque prône les valeurs comme le courage, le dépassement de soi, la persévérance, la force mentale. Ainsi, cela serait la promotion d’un mouvement de pensées et d’attitudes positives face aux combats de la vie.

En définitive, ce sont deux activités différentes mais qui sont liées par une seule et même vision qui est « Restez fort et se battre face l’adversité ». Les perspectives sont très prometteuses à tous les niveaux. Fight Back Stories étant une marque en ligne nous avons retravaillés toute notre identité visuelle afin d’offrir une plateforme de qualité et sécurisant à notre clientèle.
Le lancement du nouveau site internet se fera très prochainement. Nous sommes également en train de rechercher des partenariats de distribution dans certains grands magasins en France. Par le biais de ce voyage que je fais très bientôt aux Etas-Unis, je compte aussi prospecter pour cette jeune marque. A court terme notre objectif est de faire connaitre la vision Fight Back Stories un peu partout, qu’il y ait une appropriation et une identification au concept afin de fidéliser notre clientèle. Et à long terme, nous comptons ouvrir un magasin au Gabon dans un premier temps et partout dans le monde.

Vous êtes très suivie par la jeunesse gabonaise et la gent féminine africaine. Quel est votre regard sur le rôle de la femme gabonaise et africaine et sur le leadership féminin ?

La femme africaine est une femme qui bouge de plus en plus, qui croit en elle, qui ose et qui exige ! Nous remarquons que contrairement aux années antérieures plusieurs femmes ont des postes à responsabilités. Au travers des exemples que nous avons comme par exemple Michelle Obama, la nigériane Folorunsho Alakjia qui a une fortune estimé à plus 7,3 milliards de dollars. Considérée comme la femme la plus puissante femme noire d’Afrique et 4e personne la plus riche d’Afrique. Elle a su s’imposer dans plusieurs domaines d’activés notamment dans la mode, l’imprimerie et le pétrole.
Le leadership au féminin n’est plus une vision lointaine mais une possibilité à portée de main de beaucoup de jeunes femmes en Afrique et dans la diaspora. En tant que jeunes femmes africaines nous avons compris notre importance et notre rôle dans la société et dans cette génération. Beaucoup d’entre nous avons acceptés de prendre nos responsabilités et de nous positionner dans entrepreneuriat car c’est de là que se trouve notre potentielle richesse. Nous devons investir dans des secteurs d’activés porteurs afin d’apporter des innovations, des idées fraîches et constructives sur le marché.

Avec le terme développement personnel qui a fait un boom dans la société de plus en plus de jeunes femmes sortent de l’inertie et se mettent en action pour elles et pour les autres. Bien que le leadership au féminin soit une notion assez commune au pays africain anglophone, nous remarquons que, ces dernières années, les femmes africaines francophones sont en train de rattraper leur retard.
Un leader est celui qui est au service des autres, qui fédère afin d’œuvrer vers un objectif commun. C’est pourquoi, l’humilité est la mère de toute chose. Faire du leadership au féminin, c’’est tout simplement vouloir que toutes les femmes dans leurs domaines d’activés ou sphères de vies comprennent leur importance, leurs rôles, leurs obligations et se sentent respecter, valoriser et participative de la vision propre à leur nation. Tel est mon objectif pour mon pays le Gabon.