Une chef africaine annule plus de 1500 mariages d’enfants, les rend illégaux et renvoie les filles à l’école

Le Malawi est l’un des pays les plus pauvres du monde, et certaines des pratiques tribales du pays – y compris le mariage des enfants et l’assujettissement des femmes – sont restées loin derrière par rapport aux standards humanitaires établis dans d’autres pays au siècle dernier.

Heureusement, un district régional de l’Afrique de l’Est a choisi en 2003 d’élire une femme comme leader, nommée Theresa Kachindamoto. Au cours des 16 années qui se sont écoulées depuis son arrivée au pouvoir, elle s’est servie de son poste pour faire entrer son peuple dans le monde d’aujourd’hui d’une manière qui lui a valu le respect des gens qu’elle gouverne.

Theresa Kachindamoto est la plus jeune de 12 frères et sœurs. Elle est née dans le district de Dedza, situé entre le lac Malawi et la frontière entre le Malawi et le Mozambique, dans le centre du pays.

Après avoir travaillé comme secrétaire dans une université du sud du Malawi pendant 27 ans, son peuple l’a élue en raison de sa réputation d’être « bonne avec les gens ». Elle a rapporté quelques années plus tard qu’on l’avait informée qu’elle avait été nommée chef de sa communauté, qu’elle le veuille ou non. Il ne lui a pourtant pas fallu longtemps pour se servir de ce rôle afin de sauver la vie de milliers de filles de son district, peu importe les réticences qu’elle avait eues au moment de la prise de responsabilités liées à ce poste.

Le Malawi reste l’une des régions du monde les plus axées sur les mariages d’enfants, où la moitié des filles qui vivent dans le pays sont mariées avant l’âge de 18 ans. Jusqu’à un quart des décès maternels du pays surviennent lors de grossesses précoces, qui peuvent entraîner de graves complications en raison des difficultés accrues à prendre du poids et à se nourrir adéquatement.

Mme Kachindamoto a utilisé son rôle pour annuler plus de 1 500 mariages d’enfants depuis 2017, renvoyant les filles déjà mariées à l’école afin qu’elles puissent terminer leurs études. Elle a fait un pas en avant pour mettre fin au cycle de la pauvreté au Malawi, où une statistique publiée en 2017 par l’ONU indiquait que près de 45 % des jeunes filles ne peuvent pas rester à l’école après la quatrième.

Elle ne s’est pas arrêtée là. Bien qu’il ait fallu des années de changement de culture et d’influence sur les dirigeants politiques, Mme Kachindamoto a véritablement inauguré un sentiment de permanence dans la nouvelle ère pour les femmes du Malawi en adoptant une loi pour s’assurer que les anciennes pratiques culturelles ne persisteront pas.

« J’ai dit à [mon peuple] : ‘Que cela vous plaise ou non, je veux qu’on en finisse avec ces mariages.' »

Elle a aidé l’ensemble de la nation du Malawi à adopter un amendement constitutionnel pour faire passer l’âge légal du mariage de 15 à 18 ans, ce qui a considérablement accru les possibilités que les filles poursuivent leur scolarité. Même si les pratiques tribales peuvent encore parfois échapper aux lois du pays, elle a fait sa part au sein de sa propre communauté pour expliquer aux familles pourquoi cela les aide à long terme de mettre fin à la pratique de ces mariages précoces.

Lors de sa première tournée dans son district au début des années 2000, elle a rencontré des filles et des femmes mariées depuis l’âge de 12 ans. Souvent, a-t-elle découvert, leurs familles n’autorisaient pas les mariages par malveillance, mais plutôt par nécessité financière ; elles voyaient le mariage de leur famille avec une autre famille comme un moyen d’augmenter rapidement la main-d’œuvre et d’aider à mettre du pain sur la table.

Malgré cette réalité, elle leur a expliqué qu’il était important de laisser leurs filles à l’école.

« Quand les filles sont éduquées, tout est possible », a-t-elle déclaré lors de la 16e cérémonie annuelle de remise du prix Vital Voices Global Partnership Award, à Washington, D.C (États-Unis).

Elle n’a pas fait cela uniquement pour les jeunes filles. En 2015, elle a expliqué que plus de 150 des mariages d’enfants qu’elle avait annulés impliquaient des garçons, pas seulement des filles. Elle a ajouté que, qu’ils s’agisse de garçons ou de filles, elle ne voulait jamais traverser son district et voir des enfants être privés d’école, peu importe la situation.

« Je ne veux pas de mariages d’enfants, ils doivent aller à l’école. Nous avons maintenant établi nos propres lois pour gouverner tout le monde dans ma région en ce qui concerne les mariages, et nous ne laisserons personne de côté. Aucun enfant ne devrait traîner à la maison, jardiner ou faire des tâches ménagères pendant les heures d’école. Aucun chef de village, GVH ou clergé de l’église ne peut officialiser un mariage avant d’avoir examiné les dates de naissance du couple », a-t-elle expliqué, s’adressant au journal en ligne Nyasa Times.

Le changement sera lent, mais le pays a déjà pris des mesures positives. Le Malawi s’est engagé à respecter une poignée d’engagements des Nations unies qui vont dans la bonne direction et, espérons-le, avec une législation interdisant la pratique des mariages d’enfants au niveau national, il sera plus facile de convaincre les gens de tenir ces engagements.