Adolescents : y a-t-il encore des sujets tabous ?

L’adolescence est une période intense. C’est à la fois l’âge des transformations physiques, de la construction de l’identité, des remises en question et des premières fois : premières amours, premières blessures, premiers choix difficiles. Et pourtant, de nombreux adultes hésitent encore à aborder certains sujets avec les adolescents, par peur de mal faire, de choquer, ou de "leur mettre des idées en tête". Mais est-ce vraiment utile de garder le silence ?

En réalité, ce qu’on appelle “sujets tabous” la sexualité, le corps, les sentiments, les règles, les abus, la drogue, la violence, la dépression, l’identité, ou encore la mort ne disparaissent pas parce qu’on n’en parle pas. Bien au contraire. Les adolescents vivent avec ces questions, que ce soit dans leur tête, dans leur entourage ou sur leurs écrans. Lorsqu’aucun adulte ne leur en parle de manière ouverte et saine, ils vont chercher leurs réponses ailleurs : sur les réseaux sociaux, dans la rue, entre eux. Et souvent, ce qu’ils trouvent est incomplet, mal interprété, ou dangereux.

Prenons l’exemple de la sexualité. Beaucoup de parents préfèrent éviter ce sujet ou se contenter d’un message simple : « Protège-toi ». Mais cela ne suffit pas. Les adolescents ont besoin de comprendre ce qu’est le consentement, ce que signifie le respect dans une relation, comment écouter son propre corps, comment gérer la pression du groupe, ou comment refuser une relation qu’ils ne souhaitent pas. Ces questions vont bien au-delà de l’acte sexuel lui-même. Elles touchent à l’intime, à l’estime de soi, aux limites personnelles.

Un autre exemple : la santé mentale. De nombreux jeunes souffrent en silence : stress scolaire, solitude, anxiété, pensées noires, automutilation, mal-être… Mais si le sujet est considéré comme “trop sérieux” ou “trop adulte”, ils n’oseront pas en parler. Or, ouvrir la discussion peut sauver des vies. Il ne s’agit pas de jouer au psychologue, mais simplement de montrer qu’on est à l’écoute, qu’on prend au sérieux leur ressenti, sans minimiser ni juger.

Et que dire de la consommation de drogues ou d’alcool ? Faire croire qu’en n’en parlant pas, l’adolescent n’y pensera pas, est une illusion. Les tentations existent, parfois dès le collège. Ce que les jeunes attendent, ce n’est pas qu’on les infantilise, mais qu’on leur donne des repères clairs, des faits, des conséquences réelles, et qu’on parle avec eux, pas contre eux.

On pourrait penser que ces sujets sont gênants pour eux. Mais dans la plupart des cas, ce sont les adultes qui sont mal à l’aise. L’ado, lui, attend juste qu’on prenne au sérieux ses interrogations. Il n’a pas besoin de grands discours, mais d’un espace sûr où poser ses questions, être entendu, et obtenir des réponses honnêtes.

Il faut aussi accepter que les adolescents ne poseront pas toutes leurs questions directement, parfois par pudeur, parfois par peur du jugement. C’est pourquoi c’est à nous, adultes, d’oser briser le silence. Pas pour imposer un message, mais pour montrer qu’il est possible de parler, si un jour ils en ressentent le besoin.

Bien sûr, tout ne se dit pas n’importe comment, n’importe quand. Il faut adapter son langage, choisir le bon moment, savoir écouter avant de répondre. Mais une chose est sûre : le silence n’est jamais la meilleure option. Il laisse place au doute, à la honte ou à de mauvaises influences.

En conclusion, il ne devrait plus y avoir de sujet tabou avec un adolescent. Parce que les réalités qu’ils vivent, les questions qu’ils se posent, et les choix qu’ils font chaque jour ont un impact direct sur leur avenir. En osant en parler, avec bienveillance, respect et sincérité, on leur offre ce qu’il y a de plus précieux : la confiance et les clés pour se construire.