Hatouma Sylla, la voix d’or du Noël Mandingue

Le 24 décembre au soir, au Théâtre Public de Montreuil, elle conclura le festival Africolor, lors du traditionnel Noël Mandingue. Mais qui est donc Hatouma Sylla, jeune femme de 26 ans, l’une des nouvelles chanteuses maliennes ?

Lorsqu’elle foule pour la première fois, à 19 ans, après avoir payé elle-même son billet, le sol de la terre natale de ses parents, le Mali, Hatouma Sylla reconnaît tout. Les odeurs. Les couleurs. Les sons. Les vibrations. Comme un pays déjà étrangement familier.

"Nous ne partions jamais en famille. Pour ma mère, femme de ménage, et mon père ouvrier, emmener huit enfants représentait une charge lourde. À chaque fois, ils choisissaient l’un de nous", raconte la jeune femme de 26 ans.

À Villejuif, où elle grandit et vit encore, le "pays" reste pourtant omniprésent. "À la maison, on regardait les chaînes de télé africaines. Papa et maman nous obligeaient à parler en soninké…, raconte-t-elle avec son léger accent de banlieue parisienne. On regardait des vidéos de mariage, pour apprendre des pas de danse. On fréquentait des tribus de cousin.e.s... Enfin, quand j’ai commencé à m’intéresser au chant, je me suis documentée, j’ai regardé des vidéos, je connaissais les paysages par cœur… À tel point, je crois, qu’enfant, je pensais sincèrement être déjà partie au Mali."

Aujourd’hui, elle se ressource, chaque année, à Bamako, quartier de Fombabougou, à la frontière de Titibougou, des noms qu’elle prononce avec une gourmandise palpable.

Sur ses playlists ? Elle déroule uniquement des musiques mandingues, et surtout celles de ses idoles, les chanteuses maliennes Dialou Damba, Babani Koné, Tita Koné, Ami Koïta… "J’éprouve des émotions incroyables face à leurs techniques, leurs vibratos uniques, dit-elle. Pour moi, les sons maliens représentent l’origine-même de la musique…"

Au départ, cet amour fou était pourtant loin d’être gagné… "Mon père n’écoutait que des griottes, des chansons traditionnelles, se remémore-t-elle. Et moi, ado fan de r'n'b, qui ne jurait que par Rihanna, je détestais ça ! De la musique de blédards ! Un beau jour, pourtant, j’ai retrouvé mes racines. Finalement, aujourd’hui, c’est moi la blédarde, ahah !"
Devenir soi-même

Sa passion pour le chant commence à la petite enfance. Affublée des habits de sa mère, armée d’un déodorant ou d’une brosse à cheveux en guise de micro, elle donne de la voix et du cœur. "J’étais persuadée de chanter ultra-bien, mais tout le monde à la maison me suppliait de me taire", rigole-t-elle.
Rebelote à la kermesse de l’école primaire, où elle ouvre large son gosier : "Là encore, j’avais l’impression d’avoir un don, mais personne ne m’en touchait mot." Il faudra attendre le collège et les cours salutaires d’une prof de musique pour que tout change.

Lorsque des groupes musicaux se constituent, tout le monde se bat pour être à ses côtés, elle, l’élève timide, en manque de confiance. "Hatouma, tu chantes super bien !", s’exclament-t-ils. Enfin la reconnaissance ! Après avoir assuré, au chant, toutes les fêtes du collège, sa grande sœur, membre du staff de Miss Mali France, lui demande, à 17 ans, de chanter pour la cérémonie.

"Dès les répétitions, elle est partie en pleurs, envahie par l’émotion" se rappelle Hatouma, qui prend conscience du pouvoir de sa voix puissante. Ce qui ne manque pas de subjuguer son public... "La plupart de ceux qui viennent me voir, n’arrivent pas à croire que je suis française ! Quand je chante, je me téléporte dans un autre monde, je deviens quelqu’un d’autre, ou plutôt complètement moi-même", dit-elle....lire la suite sur rfi