Kayo Mpoyi : `` En Suède, on ne me pose pas de questions sur le colonialisme``

« Dieu est un garçon noir à lunettes » : salué par la critique, le premier roman de l’autrice suédoise d’origine congolaise raconte l’itinéraire d’une jeune femme s’affranchissant d’une éducation traditionnelle rigide.

« Je suis noire, de nationalité suédoise, née au Congo et Tshiluba », affirme Kayo Mpoyi quand on lui demande comment la définir. Dieu est un garçon noir à lunettes, son premier roman, a reçu le prix Katapult, la plus prestigieuse récompense pour un premier roman en Suède. La reconnaissance, elle l’obtient aussi en France, où elle figure dans la première liste du prix du roman étranger.

Trous de mémoire

Comme sa jeune héroïne, Adi, l’autrice est née au Zaïre (aujourd’hui RDC) et elle a habité en Tanzanie. Si elle s’est inspirée de faits réels, elle revendique sa part de fiction : « Je n’avais pas l’intention de raconter une histoire vraie. Quand le récit l’a exigé, j’ai dévié de la réalité. Même s’ils ressemblent à ma famille, tous les personnages sont une fraction de ce que sont les vrais gens, ils obéissent à une fonction. Mon but n’est pas de raconter l’histoire refoulée de ma famille, il est impossible de combler les trous de mémoire, on peut seulement tourner autour. » Et Kayo Mpoyi de préciser son intention et l’urgence qui l’a animée : « Je parle de culpabilité et de devoir. C’est une histoire qui m’oblige, je devais l’écrire. »

L’histoire, c’est celle d’Adi, entre 1989 et 1994 à Dar es-Salam (Tanzanie). Le foyer familial est écrasé par le joug du père, qui reproduit le schéma qu’il a lui-même connu. « Le malheur poursuit celui qui se dresse face à ses parents. Je vous ai tracé un chemin, suivez-le, obéissez-moi et obéissez à dieu, et tout ira bien pour vous. » Sa mère, dont la religiosité est teintée de mysticisme, se plie elle aussi aux rôles traditionnels. Ainsi, lorsqu’elle interrompt Adi en train de jouer avec sa sœur pour qu’elle cuisine, « elle dit qu’un jour, je vais devenir mère et qu’il faudra bien alors que je sois capable de faire à manger pour mes enfants. »...lire la suite sur jeuneafrique