Nigéria: la difficile lutte contre les infanticides commis dans le secret des communautés locales

Quand Aisha Ayuba a donné naissance à des jumelles il y a huit ans, elle a décidé de les donner au lieu de risquer qu'elles soient assassinées.


Dans son village de Kaida, situé à environ 50 km au sud-ouest de la capitale du Nigeria, les bébés issus de naissances multiples sont considérés comme malfaisants.

"Si je gardais les enfants, quelqu'un les tuerait", déclarait la jeune femme de 29 ans. 


D'autres bébés considérés comme "mauvais" par le groupe ethnique Basso Komo au Nigéria incluent ceux avec des incapacités physiques ou mentales, ceux dont les mères meurent pendant l'accouchement, les bébés dont les dents supérieures poussent avant les dents inférieures et les bébés albinos. "Les gens craignent que s'ils ne les tuent pas, ils tueront leur mère ou leur père", a déclaré Musa Lakai, chef du village de Kaida.

Comme chaque groupe, nous avons nos propres cultures et croyances

L'infanticide était autrefois commun dans certaines parties du Nigéria, le travail des missionnaires à la fin du 19ème siècle en a réduit le nombre même si le phénomène continue dans le secret des communautés.

Les militants et le gouvernement essaient de s'attaquer aux superstitions qui se cachent derrière ces meurtres et s'attaquent aux dénis et au secret qui les entourent pour protéger les enfants vulnérables.

Incapable de garder ses filles, Ayuba les a remis à un couple de missionnaires qui a fondé la Vine Heritage Home Foundation dans la ville voisine d'Abuja en 2004 pour les bébés qui risquent d'être tués.
Le couple a supposé à tort que c'était des cas isolés, en 2005, ils s'occupaient de 20 enfants. Maintenant 112 vivent avec eux, âgés entre une semaine et 14 ans.

Empoisonné, supprimé, abandonné

Personne ne connaît la véritable ampleur de l'infanticide au Nigeria. Les bébés sont généralement tués avec des plantes vénéneuses, ou ceux dont les mères meurent en couches sont enterrés avec elle, ou abandonnés dans une pièce jusqu'à ce qu'ils meurent de faim, selon le couple.

Selon l'Organisation mondiale de la santé, le Nigéria a l'un des taux de mortalité maternelle les plus élevés au monde, avec 814 décès pour 100 000 naissances vivantes en 2015.
Ajayi précise que le couple n'a pas mis les enfants en adoption mais les a gardés jusqu'à ce qu'il soit sûr de les "renvoyer à leurs familles".



"Avant, nous allions dans les villages pour mendier les bébés, maintenant ils nous les apportent", a-t-elle dit, attribuant ce changement de mentalité au programme lancé il y a cinq ans par la National Orientation Agency (NOA), un organisme gouvernemental de lutte contre les infanticides.

 

Source: rtbf.be